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Les nouvelles et opinions traitées par Alex Gustave Azebaze

FRANCE/EUROPE: LE TRAVAIL DISPARAÎT DRAMATIQUEMENT. POURQUOI?

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A chaque publication des chiffres du chômage en

France, on enregistre les réactions suivantes :  » le

gouvernement est nul »;  » la croissance va bien finir

par arriver « ; nous avons pris de bonnes mesures,

il  faut un peu depatience ». 

La question essentielle, celle de la disparition du travail, en elle-même, est rarement abordée ni discutée.

Or, depuis des décennies le travail disparaît en Europe, mais maintenant le phénomène s’accélère chaque année.

Les deux grandes causes de l »absence de travail sont (i)la mondialisation et (ii)l’automation/robotisation.

Revenons-y et analysons calmement, loin des médias traditionnels et raccourcis politiciens.

1. La mondialisation néo-libérale

Il se caractérise par le « laissez-passer les marchandises » .  Nous aurons beau baisser les salaires, bloquer le SMIC, réduire les charges sociales, nous resterons loin des prix de revient des pays émergents (Chine, Inde, Brésil, Indonésie… et bientôt l’Afrique).
Nous sommes 15 ans trop tard pour mettre un protectionnisme dur aux frontières de l’U.E.

Il aurait fallu écouter Maurice Allais, le défunt prix Nobel d’économie français qui disait:  « La pire erreur de l’Europe a été de ne pas mettre en place une préférence communautaire qui aurait été progressivement levée, au fur et à mesure du rapprochement des écarts salariaux avec le monde émergent »

Le seul protectionnisme qui reste est celui par les normes (le Traité transatlantique est essentiellement une tentative de protectionnisme par les normes vis à vis des émergents et un peu de l’Europe).

Depuis 40 ans tous nos politiques nous ont privilégiés en tant que consommateur et tués à petit feu en temps que producteur. Conséquence : en France la part de l’industrie dans la valeur ajoutée est passée de 18 % en 2000 à 12,5 %en 2011… Les faibles coûts du travail des étrangers d’ailleurs, bien plus que des étrangers de l’intérieur, sont une des causes de la disparition du travail chez nous, bien que les émergents nous en aient aussi donné, mais la balance est déséquilibrée.

Laissez passer les personnes : le Royaume-Uni et surtout l’Allemagne profite du droit de circuler et de travailler dans l’UE pour faire du dumping social . Ainsi, en Allemagne, il y a des salaires de 3 à 6 €uros de l’heure dans l’agro-alimentaire, l’agriculture et les services.

Sauf à sauter le SMIC en France (impossible) ou à baisser les charges patronales (ce que fait Hollande) nous ne pourrons au mieux que réduire de 1% le taux du chômage, mais c’est déjà beaucoup, en particulier pour les jeunes où il baisse déjà régulièrement.

Laissez faire la finance : la crise de 2007 n’a pas suffi. Les fanatiques de la planche à billets (FED, Banque d’Angleterre et BoJ) nous préparent une super bulle qui ne manquera d’exploser dans 1 à 3 ans.

 

2. La robotisation, l’automatisation, la rationalisation, le « faîtes le vous-mêmes » etc…

Cette cause de la disparition du travail en Occident a commencé depuis 50 ans mais elle devient de plus en plus importante.

Le salaire représente une part de plus en plus faible dans le coût d’un produit.

Cette tendance va se poursuivre car tout ce qu’une entreprise compte d’intelligence réfléchit en permanence à « comment réduire la part de travail salarié dans les coûts ».

Cela va poser un énorme problème de répartition de la valeur ajoutée et aussi du temps de travail.

Une véritable révolution, comparable à la révolution néolithique !

Que faire ?

La croissance ? Une croissance forte, créatrice d’emplois (environ + de 2% car bien des entreprises sont en sous-activité) n’est réservée qu’à des situations exceptionnelles :

pays en voie de développement : mais leur croissance faiblit aussi, d’où répercussions sur nos économies.

– après une guerre mondiale : ce qui se passe dans l’Asie du sud entre la Chine et ses voisins est inquiétant.

– lorsque la finance choisit de déverser un flot de crédit sur les particuliers, promoteurs, entreprises et États… avec en bout de ligne une catastrophe financière (cas passé de la Grèce, de L’Espagne, de l’Irlande…, cas actuel des États-Unis, du Royaume-Uni et du Japon qui font marcher à fond la « planche à billets »).

Le risque de l’explosion d’une bulle, et peut-être même de LA bulle, est alors probable  !

Si nous ne sommes dans aucun de ces 3 cas, il y a une forte probabilité que les prochaines années verront dans la plupart des pays d’Europe une croissance de + ou -1%.

Une croissance zéro ne serait pas, en soi, une catastrophe.

Toutefois les conséquences du choc démographique sont inquiétantes pour les pays développés. Il coûte en effet très cher (3 à 4 points de PIB) et engendre une perte de dynamisme.

La robotisation à outrance alors?

Paradoxalement, alors qu’elle est une source de « chômage », cela pourrait être la solution à la concurrence déséquilibrée : un robot « français » travaille à peu près au même coût qu’un robot « chinois » et à peine plus cher qu’un ouvrier chinois.

Il faut également tenir compte d’autres économies de coût comme celui du transport et de la plus grande réactivité si l’usine est en France ou en Europe et proche de ses clients.
Le coût de la main-d’œuvre deviendra à l’avenir presque secondaire.
Déjà elle ne représente que 8 à 15 % du coût d’une voiture pour un constructeur.

Le coût du travail n’est donc pas le principal vecteur de compétitivité des usines.

Mieux partager la valeur ajoutée ?

La disparition du travail est un problème essentiel qui devrait mobiliser les intellectuels (économistes, juristes, sociologues, philosophes) dans une démarche prospective.

Je pense en particulier à Thomas Piketty, le Marx 2.0 du XXIème siècle !

Une étude sur « Le travail au XXIe siècle » serait d’utilité publique et complémentaire de ce qu’il a déjà démontré dans « Le capital au XXIe siècle » sur les inégalités de revenu, les inégalités de patrimoine et le rapport capital/revenu dans les pays développés.

Imaginons en 2030 une usine où, à force de mécaniser et de robotiser, il ne resterait plus que quelques salariés pour l’entretien.
Dans ce cas de figure les actionnaires percevraient toujours leurs dividendes, mais la part dévolue au salaire aurait, elle, quasiment disparue.

Il se pose donc problème le problème aigu du partage de la valeur ajoutée.

Ce processus est déjà à l’œuvre, mais presque aucun média n’en parle.
Je donne cette fiction pour montrer que le capital réel est bien le résultat du travail passé (HISTORIQUE) des ouvriers, comptables, dessinateurs, ingénieurs… et managers.

Le revenu des non-actionnaires devra de plus en plus être déconnecté du travail d’entreprise.
Le travail bénévole dans des secteurs limités bien particuliers (santé, enseignement, maisons de retraite…) devra être pris en compte, même si c’est de façon marginale.

Mieux partager le travail ?

Affirmation : « les robots et les machines ne créent pas de chômage, c’est la vieille illusion luddite, démontée à l’époque par Ricardo, et plus récemment par Alfred Sauvy, ils ne font que déplacer des emplois vers de nouvelles activités ».

Vraie à certaines époques (Europe dominante centre du monde, 30 glorieuses) elle est devenue totalementfausse.

L’économiste Keynes lui-même nous prédisait, dès les années 1930, la semaine de 15 heures de travail grâce au progrès technique…

Il y a désormais, en France, plus de gens qui pointent au chômage qu’à l’usine : 4,6 millions fin décembre 2012.  

Michel Rocard, Pierre Larrouturou et d’autres le disent très bien :
« Le partage du travail actuel est un non-sens :
– d’un côté tous ceux et celles qui font 0 heures par semaine car ils sont au chômage.
– de l’autre, tous ceux qui travaillent plein pot (et parfois trop) : la durée réelle d’un plein temps est supérieure à 38 heures d’après l’INSEE
– au milieu, toutes celles et ceux qui galèrent avec des petits boulots à temps partiel, sur la semaine ou sur l’année.
Cette forme de partage du travail est un non-sens car elle provoque une énorme souffrance aussi bien du côté de ceux qui travaillent 0 heure par semaine que du côté de ceux qui travaillent plein-pot mais acceptent de plus en plus des emplois stressants ou médiocrement payés car ils ont peur d’être dans le prochain plan social « si tu n’es pas content, va voir ailleurs ».
Ce partage du travail profite essentiellement aux actionnaires dont les revenus n’ont jamais été aussi élevés. »

Réduire le coût de l’heure de travail salarié ?

Il faudra diminuer les charges patronales sur le salaire et le transférer sur la TVA, ce qui, au passage, aura un petit effet protectionniste.

Une simplification devra être faite un jour car à force de supprimer des charges par déductions on n’y comprend plus rien.

Il vaudrait mieux mettre des taux zéro.

Raser les vieilles usines et subventionner la construction de nouvelles usines ?

L’usine Toyota à Denain est compétitive parce qu’elle est neuve, en un seul bâtiment et très robotisée.

Rien à voir à d’autres usines qui ont près de 40 ans.

 

Relocaliser ?

Les exemples de relocalisation sont très nombreux.

Tous ont en gros le même profil :

– la Chine leur pille leurs brevets et leur savoir faire

– la productivité horaire des salariés français est supérieure à celle des Chinois ou d’autres pays d’Europe.

– réduction des frais de transport.

– réduction des délais pour sortir de nouveaux modèles.

– et surtout : robotisation, automatisation et rationalisation à outrance.

 

Fabriquer des objets à très faible utilité sociale ?

La TVA à 25 ou 30% devrait être prioritairement pour eux.

 

Créer des « bullshit jobs » ?

L’invasion des «métiers à la con», une fatalité économique ?

Avec un questionnaire pour savoir si vous faîtes un «boulot à la con», ou «bullshit job», comme les nomme l’anthropologue anglais David Graeber.

C’était la solution, les remettre au travail,

comment n’y avons-nous pas penser plus tôt !

A nous la verdure, à nous le farniente…

 

 

Photo Yves Brette

* * * * * *

 MARCO NOUR

Sources:

« Le travail disparaît »   vidéo par Paul Jorion économiste et anthropologue

 

44% des firmes qui ont réduit leurs effectifs depuis la crise de 2008 l’ont fait en automatisant les tâches. (rapport de 2011 du McKinsey Global Institute)

 

Renault Flins (la plus vieille usine du groupe) :

en 2000 : 400.000 voitures produites par 20.000 salariés

en 2012 : 150.000 voitures produites par 2.700 salariés

Production divisée par 2,6 et effectif divisé par 7,4

(le Canard Enchaîné)
Le nouveau porte-conteneurs « Jules Vernes » (CMA CGM)
396 mètres de long (comme 5 A380)
16.000 conteneurs (96 km s’ils sont mis bout à bout)
puissance 108.000 ch (équivalent à 1.000 voitures)
poussée de 25 nœuds équivalents à la poussée de 10 réacteurs d’A380
Personnel navigant : 26
(Sciences et Avenir)

 

La ferme des mille vaches, en construction

Pour gérer un troupeau de 1 000 vaches, il faut environ 42 salariés paysans.

Cette usine à vaches en emploiera 18 !
– 14.03.13 Robotique. Une chance pour l’agroalimentaire

 

– Les 3 pays qui ont le plus de robots par 10.000 ouvriers : le Japon, l’Italie et l’Allemagne sont aussi ceux qui ont le taux de fécondité le plus faible (autour de 1,4 ; la France 2).

 

Les fabricants de robots :
1er Fanuc (Japon)
2 Yaskawa Electric Co (Japon)
3 Kuka (Allemagne)
4 Comau (Italie)

Nombre de robots pour 10 000 ouvriers :
Japon……… 1 430
Italie…….…. 1 220
Allemagne….1 120
USA………….1 110
Espagne….…..884
Corée du Sud. 738
FRANCE………608

 

Nouriel Roubini économiste : « La crise n’est pas finie »

Il fut un des rares à s’inquiéter dès 2006 de l’éclatement de la bulle immobilière aux États-Unis.

… » L’usine du futur pourrait faire travailler 1.000 robots pour une seule personne chargée de la maintenance et une autre du nettoyage…

Ce mouvement de relocalisation d’entreprises très productives risque donc de ne pas créer beaucoup d’emplois

Cela préfigure un monde dans lequel les salariés très qualifiés auront leur part du gâteau, mais où les cols bleus, et même certains cols blancs, seront laissés pour compte.

La distribution des revenus risquent de devenir de plus en plus inégalitaire. »

(extrait de l’interview du Point du 5.06.2014)

 

 

Auteur : alexgustaveazebaze

Diplômé en Droit Politique et Relations Internationales Journaliste Indépendant - Analyste économique et Politique/ Consultant en Com, Médias et Droits Humains

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